Nichée au cœur du désert algérien, Ouargla fascine par son histoire millénaire et son rôle économique majeur. Découvrez cette oasis unique, entre traditions séculaires et modernité pétrolière.
Une oasis au riche passé
Aux origines de la cité
L’histoire d’Ouargla remonte à la préhistoire. Des traces d’occupation humaine datant du Paléolithique inférieur (250 000 à 200 000 ans avant notre ère) ont été découvertes dans la région, notamment des bifaces et des racloirs. À l’époque néolithique (4500-3000 av. J.-C.), les abords des sebkhas (lacs salés) révèlent d’anciens foyers de combustion, témoins d’une présence humaine continue.
La fondation de la ville elle-même remonterait au 7e ou 8e siècle. Son nom proviendrait des Béni Ouarglis, une tribu zénète qui s’y établit. En berbère, « Ouargla » (Wargrən) signifierait « celui qui est barricadé », évoquant peut-être le caractère défensif de la cité.
Carrefour commercial et culturel
Dès le Moyen Âge, Ouargla s’impose comme un carrefour majeur du commerce transsaharien. Sa position stratégique en fait une étape incontournable pour les caravanes reliant l’Afrique du Nord au Soudan. La ville prospère grâce aux échanges d’or, de sel, d’esclaves et de marchandises diverses.
Au 9e siècle, la région adhère à l’ibadisme, une branche de l’islam. Après la destruction de Tahert en 909, des réfugiés ibadites fondent la cité voisine de Sedrata, qui devient un centre culturel et commercial florissant. Ouargla bénéficie de cet essor et s’affirme progressivement comme le pôle principal de la région.
Période | Événement marquant |
---|---|
7e-8e siècle | Fondation présumée d’Ouargla |
9e siècle | Adoption de l’ibadisme |
909 | Destruction de Tahert et fondation de Sedrata |
11e-13e siècle | Apogée du commerce transsaharien |
16e siècle | Déclin progressif du commerce caravanier |
Le déclin et la période coloniale
À partir du 16e siècle, Ouargla connaît un déclin progressif. Le commerce transsaharien perd de son importance avec l’essor du commerce maritime. La ville passe sous l’influence du beylik de Constantine, tout en conservant une certaine autonomie.
La conquête française marque un nouveau tournant. En 1853, une intervention militaire déloge le sultan Mohammad Benadallah, chef de la résistance locale. Ouargla devient un poste militaire stratégique pour le contrôle du Sud algérien. La ville est intégrée à l’administration coloniale en 1872.
Une ville entre tradition et modernité
Le ksar, cœur historique
Le ksar d’Ouargla constitue le joyau architectural et culturel de la ville. Ce quartier historique, classé au patrimoine national algérien, s’étend sur 30 hectares. Il est composé de trois quartiers traditionnels :
- Beni Brahim
- Beni Sissine
- Beni Ouaguine
Le ksar abrite de nombreux trésors patrimoniaux :
- Des maisons traditionnelles à l’architecture typique
- Des zaouïas (centres religieux et culturels)
- Un marché historique
- Deux grandes mosquées :
- La mosquée malékite Lalla Malkia
- La mosquée ibadite Lalla Azza
- La maison et la bibliothèque des Pères Blancs
Sept portes historiques donnent accès au ksar : Bab Amor, Bab Ami, Bab Bouchak, Bab El Boustène, Bab El Khoukha (Rabaa), Bab Azzi et Bab Errabia. Bien que le bâti soit parfois dégradé, des travaux de réhabilitation sont en cours pour préserver ce patrimoine unique.
Une ville en expansion
Au fil du 20e siècle, Ouargla s’est considérablement développée au-delà de son ksar. La ville moderne s’organise en cercles concentriques autour du centre historique. On distingue plusieurs phases d’urbanisation :
- La ville coloniale des années 1930, avec son plan triangulaire et ses bâtiments administratifs
- Les quartiers de sédentarisation des anciens nomades : Said Otba au nord, Mekhedma au sud-ouest, Beni Thour au sud-est
- Les cités de logements collectifs construites après l’indépendance
- Les nouveaux quartiers administratifs en développement au sud
L’agglomération s’étend désormais sur les communes voisines de Rouissat et Aïn Beida. Cette expansion rapide pose de nouveaux défis en termes d’aménagement urbain et de gestion des ressources.
Un pôle économique majeur
Ouargla est devenue un centre économique crucial pour l’Algérie, principalement grâce à l’exploitation pétrolière. Bien que les gisements se trouvent à Hassi Messaoud, à 80 km de là, Ouargla joue un rôle de base arrière logistique pour l’industrie pétrolière.
Cette activité a profondément transformé l’économie et la société locale :
- Hausse des salaires et du niveau de vie
- Afflux de travailleurs migrants
- Développement des infrastructures et des services
Néanmoins, l’agriculture oasienne reste importante. La palmeraie d’Ouargla, une des plus grandes du Sahara algérien, s’étend sur 6000 hectares et compte environ un million de palmiers-dattiers. La phœniciculture (culture du palmier-dattier) y est pratiquée, ainsi que d’autres cultures comme les raisins et les olives.
Secteur économique | Importance |
---|---|
Industrie pétrolière | Majeure (indirecte) |
Agriculture oasienne | Significative |
Services et administration | Croissante |
Tourisme | Potentiel en développement |
Une population diverse et en croissance
Démographie dynamique
La population d’Ouargla a connu une croissance spectaculaire au cours des dernières décennies. Selon le recensement de 2008, la commune comptait 133 024 habitants, et l’agglomération (incluant Rouissat) atteignait 169 927 habitants. Cette évolution démographique est impressionnante quand on sait qu’en 1966, la ville ne comptait que 20 000 habitants.
Plusieurs facteurs expliquent cette croissance :
- Le développement de l’industrie pétrolière à Hassi Messaoud
- L’exode rural et la sédentarisation des populations nomades
- L’immigration en provenance d’autres régions d’Algérie
- Le taux de natalité élevé
Ouargla est aujourd’hui la deuxième agglomération urbaine du Sahara algérien, après Biskra. Elle a dépassé en importance des villes comme Touggourt et Ghardaïa, qui la surpassaient durant la période coloniale.
Une mosaïque culturelle
La population d’Ouargla est remarquablement diverse, reflet de son histoire et de son attractivité économique. On peut distinguer plusieurs groupes :
- Les Ouarglis autochtones :
- Habitants historiques du ksar
- Parlent le tagargrent, une variante locale du berbère
- Organisés traditionnellement en trois fractions : At Brahim, At Ouagguine, At Sissine
- Les anciennes tribus nomades sédentarisées :
- Said Otba
- Mekhadma
- Beni-Thour
- Les migrants venus d’autres régions d’Algérie :
- Originaires du Nord (Alger, Kabylie, etc.)
- Attirés par les opportunités économiques liées au pétrole
Cette diversité est source de richesse culturelle, mais peut aussi créer des tensions. Les autochtones, souvent à la peau plus foncée, accusent parfois les « nordistes » de leur « voler les emplois » et de se comporter en « colons ».
Défis sociaux et identitaires
La croissance rapide d’Ouargla et les mutations économiques ont engendré de nouveaux enjeux sociaux :
- Intégration des populations migrantes
- Préservation de l’identité culturelle locale
- Lutte contre le chômage, notamment chez les jeunes
- Amélioration des conditions de vie et des infrastructures
Ces défis ont parfois donné lieu à des mouvements de contestation. Un groupe appelé « Les Fils du Sahara » a émergé, revendiquant une meilleure redistribution des richesses pétrolières et une plus grande autonomie régionale. Des émeutes éclatent périodiquement, exprimant la frustration d’une partie de la population.
Un climat extrême
Caractéristiques climatiques
Ouargla possède un climat désertique chaud (classification de Köppen : BWh), typique du Sahara. Les principales caractéristiques de ce climat sont :
- Des étés extrêmement chauds et prolongés
- Des hivers courts et relativement doux
- Une très faible pluviométrie
- Une forte amplitude thermique entre le jour et la nuit
- Un ciel généralement dégagé
Ouargla détient le record de la température la plus élevée jamais enregistrée en Algérie : 51,3°C, mesurée le 5 juillet 2018.
Données climatiques
Paramètre | Valeur |
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Température moyenne annuelle | 23,5°C |
Température moyenne en juillet (mois le plus chaud) | 36,8°C |
Température moyenne en janvier (mois le plus froid) | 11,5°C |
Précipitations annuelles moyennes | 45 mm |
Nombre de jours de pluie par an | 16 |
Ce climat extrême pose de nombreux défis pour la vie quotidienne et l’agriculture. L’irrigation est indispensable pour maintenir la palmeraie et les autres cultures. La gestion de l’eau est un enjeu crucial pour la ville.