Jijel : joyau de la côte algérienne surnommée « la petite Kabylie maritime »

Ali

Nichée sur le littoral nord-est de l’Algérie, Jijel est une ville côtière aux multiples facettes. Entre mer et montagne, cette cité millénaire séduit par ses paysages spectaculaires, son riche patrimoine historique et sa douceur de vivre méditerranéenne. Partons à la découverte de cette perle méconnue de la côte algérienne, surnommée « la petite Kabylie maritime ».

Situation géographique et climat

Jijel se situe à environ 300 km à l’est d’Alger, sur la côte méditerranéenne. Chef-lieu de la wilaya éponyme, la ville est adossée au massif montagneux des Babors qui culmine à plus de 2 000 mètres d’altitude. Cette situation privilégiée lui confère un relief varié entre plaines côtières et contreforts montagneux.

La wilaya de Jijel s’étend sur une superficie de 2 398 km² et compte une population d’environ 736 000 habitants. Elle est limitée :

  • au nord par la mer Méditerranée
  • à l’ouest par la wilaya de Béjaïa
  • à l’est par la wilaya de Skikda
  • au sud-ouest par la wilaya de Sétif
  • au sud par la wilaya de Mila
  • au sud-est par la wilaya de Constantine

Jijel bénéficie d’un climat méditerranéen typique, caractérisé par :

  • Des étés chauds et secs avec des températures moyennes entre 25°C et 35°C
  • Des hivers doux et humides avec des températures entre 5°C et 15°C
  • Une pluviométrie abondante, entre 800 et 1 200 mm par an
  • Des vents dominants soufflant du nord-nord-ouest vers le sud-sud-est

Cette pluviométrie importante fait de Jijel l’une des régions les plus arrosées d’Algérie. Le col de Texenna, situé à 725 m d’altitude, connaît même un enneigement moyen de 11 jours par an.

Histoire : un carrefour de civilisations

L’histoire de Jijel remonte à l’Antiquité. Son nom actuel dérive de l’antique Igilgili, cité phénicienne puis romaine. Au fil des siècles, la ville a connu de nombreuses influences qui ont façonné son identité :

De l’Antiquité au Moyen Âge

Dès le Xe siècle av. J.-C., les Phéniciens fondent un comptoir commercial à l’emplacement de l’actuelle Jijel. La cité passe ensuite sous domination :

  • Carthaginoise au Ve siècle av. J.-C.
  • Numide au IIIe siècle av. J.-C.
  • Romaine à partir de 33 av. J.-C. : Igilgili devient une importante colonie romaine
  • Vandale au Ve siècle
  • Byzantine au VIe siècle

Au VIIe siècle, la région est conquise par les Arabes. La population majoritairement chrétienne se convertit progressivement à l’islam. Jijel passe sous le contrôle de diverses dynasties musulmanes :

  • Aghlabides au IXe siècle
  • Fatimides au Xe siècle
  • Zirides puis Hammadides aux XIe-XIIe siècles
  • Almohades au XIIe siècle
  • Hafsides à partir du XIIIe siècle

Au XIIe siècle, la ville est brièvement occupée par les Normands de Sicile.

Période ottomane (1514-1830)

En 1514, les frères Barberousse s’emparent de Jijel et en font leur base arrière pour lutter contre les Espagnols. La ville intègre alors la Régence d’Alger sous domination ottomane. Elle devient un important port pour l’activité corsaire en Méditerranée.

Quelques dates clés de cette période :

  • 1611 : Raid espagnol sur Jijel, qui est incendiée puis reprise l’année suivante
  • 1664 : Expédition française du duc de Beaufort, repoussée après 3 mois d’occupation

Sous les Ottomans, Jijel bénéficie de certains privilèges, comme le droit pour ses habitants de porter des armes en ville.

Colonisation française (1839-1962)

Le 13 mai 1839, les troupes françaises s’emparent de Jijel. La résistance locale se poursuit jusqu’en 1851. Quelques dates importantes :

  • 1856 : Un séisme détruit la vieille ville
  • 1860 : Jijel est érigée en commune
  • 1950 : La ville reçoit la Croix de guerre 1939-1945

Durant la guerre d’Algérie, Jijel fait partie de la Wilaya II du FLN et abrite d’importants maquis.

Depuis l’indépendance

Après l’indépendance en 1962, Jijel connaît un important développement :

  • 1974 : La ville devient chef-lieu de wilaya
  • Années 1980-1990 : Fort exode rural et croissance démographique
  • Années 1990 : La région est touchée par la guerre civile
  • Depuis 2000 : Développement économique et touristique

Organisation administrative

La wilaya de Jijel est divisée en 11 daïras (districts) regroupant 28 communes. Voici un tableau récapitulatif de cette organisation :

Daïra Communes
Jijel Jijel
Texenna Texenna, Kaous
Taher Taher, Emir Abdelkader, Chahna, Ouled Askeur, Oudjana
El-Milia El-Milia, Ouled Yahia
El-Aouana El-Aouana, Selma Benziada
El-Ancer El-Ancer, Bouraoui Belhadef, Kheiri Oued Adjoul, Djemaa Béni H’bibi
Chekfa Chekfa, Sidi Abdelaziz, El-Kennar, Bordj T’har
Ziama Mansouriah Ziama Mansouriah, Erraguene
Sidi Maarouf Sidi Maarouf, Ouled Rabah
Djimla Djimla, Boudria Béni Yadjis
Settara Settara, Ghebala

Économie : entre mer et terre

L’économie de Jijel repose sur plusieurs piliers qui tirent parti des atouts naturels de la région :

Agriculture et pêche

Le climat humide et les terres fertiles font de l’agriculture un secteur clé :

  • Cultures maraîchères
  • Arboriculture (oliviers, agrumes)
  • Élevage

La pêche occupe également une place importante, avec plusieurs ports le long de la côte :

  • Port de Jijel
  • Port de Ziama Mansouriah
  • Port d’El Aouana

Industrie

Le secteur industriel s’est développé ces dernières décennies, notamment autour :

  • Du port en eaux profondes de Djen Djen, spécialisé dans le trafic de conteneurs
  • De la zone industrielle de Bellara, qui abrite une importante aciérie
  • De l’exploitation du liège, Jijel possédant les plus grandes forêts de chênes-lièges d’Algérie

Tourisme

Le tourisme est devenu un secteur économique majeur pour Jijel, qui attire chaque année des millions de visiteurs grâce à :

  • Ses plages de sable fin
  • Ses paysages spectaculaires (corniche, grottes)
  • Son patrimoine historique
  • Le Parc National de Taza

La wilaya compte 25 hôtels, 20 campings et 5 agences touristiques pour accueillir les visiteurs.

Patrimoine naturel : entre mer et montagne

Jijel fascine par la beauté et la diversité de ses paysages, entre Méditerranée et massif des Babors :

Un littoral exceptionnel

La côte jijelienne s’étend sur 120 km et offre une grande variété de paysages :

  • À l’ouest : une côte rocheuse et escarpée, la fameuse « corniche jijelienne »
  • À l’est : de longues plages de sable fin

On compte au total 50 plages, dont 23 surveillées. Parmi les plus réputées :

  • Plage de Kotama
  • Grand Phare
  • Rocher Noir
  • Cavallo
  • Tassoust
  • Béni Belaïd

La corniche jijelienne offre des paysages à couper le souffle, avec ses falaises plongeant dans la mer, ses criques sauvages et ses grottes. Les plus célèbres sont les « Grottes Merveilleuses », situées à 35 km à l’ouest de Jijel.

Un arrière-pays montagneux

L’intérieur des terres n’est pas en reste, avec :

  • Le massif des Babors, qui culmine à 2 004 m au Djebel Babor
  • D’immenses forêts de chênes-lièges
  • Le Parc National de Taza, qui abrite une faune et une flore exceptionnelles

Une biodiversité remarquable

La région de Jijel abrite plusieurs espèces emblématiques :

  • Le singe magot, seul primate sauvage d’Afrique du Nord
  • Le goéland d’Audouin
  • Le chacal doré

Malheureusement, certaines espèces autrefois présentes ont disparu, comme le léopard de Barbarie, exterminé dans les années 1920-1930.

Patrimoine culturel : un héritage millénaire

Jijel possède un riche patrimoine culturel, fruit de son histoire mouvementée :

Sites archéologiques

  • Vestiges de la cité romaine d’Igilgili
  • Nécropole punique de Taza
  • Grottes préhistoriques, comme Ghar el-Baz

Monuments historiques

  • Fort Duquesne, construit par les Français en 1856
  • Phare de Ras El Afia, datant de 1865
  • Grande Mosquée de Jijel, édifiée au XVIe siècle

Musées

  • Musée Kotama, dédié à l’histoire de la région
  • Musée du Parc National de Taza

Traditions vivantes

La culture jijelienne reste profondément ancrée dans ses racines berbères et arabes :

  • Yennayer : le Nouvel An berbère, célébré le 12 janvier
  • Waâda : fêtes votives en l’honneur des saints locaux
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